Conventions règlementées : La non-déclaration par une directrice des conventions d’achats entre l’ESMS et son époux peut justifier son licenciement… tant que les faits ne sont pas prescrits !

Cour d’Appel de Versailles, 15ème Chambre, 15 décembre 2022, n°20/01779

L’obligation faite aux directeurs d’établissements sociaux et médico-sociaux de déclarer conventions auxquelles sont parties les membres de la famille est prévue par la loi (L.313-25 du Code de l’action sociale et des familles alinéa 2). 

Suivant une enquête diligentée par l’association, il est apparu que la directrice d’un institut de jeunes sourds avait réalisé d’importants achats pour l’établissement auprès d’une société exploitée par son époux pour un montant global estimé à plus de 50.000 € par l’association employeur.

La directrice a contesté son licenciement. Débouté par le Conseil des prud’hommes, elle vient d’obtenir satisfaction devant la Cour d’appel.

Cette dernière remarque que les fautes reprochées existent. Elle rappelle qu’il pèse en effet sur les directeurs d’établissements une obligation de procéder aux déclarations des conventions passées directement ou par personne interposée avec l’association gestionnaire, tout comme les conventions auxquelles sont parties les membres de leur famille. 

Pour rappel, cette obligation est commune aux administrateurs de l’association.

Pourtant, cette faute grave n’a pas suffi à la Cour d’appel, qui infirme le jugement au motif que l’employeur n’apporte pas la preuve de ce qu’il n’a eu connaissance des faits fautifs que dans les deux mois précédant l’engagement des poursuites. 

Conséquence sévère de cette infirmation, mais sans doute d’un certain « laxisme » de l’association dans le contrôle des conventions passées dans son intérêt, une condamnation au versement de la somme de : 

  • 5 000 € au titre de dommages et intérêts au titre du manquement à l’obligation de prévention en matière de santé et de sécurité,
  • 49 665,18 € au titre de l’indemnité de préavis, outre la somme de 4 966,52 € au titre des congés payés y afférents
  • 82 775,30 € au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement 
  • 70 000 €, au titre des dommages et intérêts pour licenciement nul.

L’arrêt de la Cour d’appel mérite d’être lu à bien des égards, puisqu’il retient en outre que la salariée aurait en réalité été sanctionnée pour avoir relaté des faits de harcèlement moral.